Ramadan et alimentation
En tant que naturopathe, je ne m’attarderai que sur le sujet de l’alimentation, le reste n’étant pas de mon domaine.
Toutefois, voici un petit rappel simplement pour situer les choses. Chaque année, des millions de musulmans accomplissent le rituel du jeûne pendant le mois du Ramadan. Cela consiste à jeûner du lever du soleil jusqu’au coucher du soleil. Le mois du Ramadan est basé selon un calendrier lunaire, c’est la raison pour laquelle la date n’est pas fixe, tout au contraire, elle varie d’année en année et avance de 10 jours par an. Notons que cette année la période du Ramadan se situera environ entre le 15 mai et le 14 juin 2018. Environ 30 jours de jeûne total, sans boire ni manger, du lever au coucher du soleil.
Le déroulement type du jeûne pendant le mois du Ramadan est :
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Un réveil avant le lever du jour, parfois très tôt, en fonction du mois, afin de pouvoir boire une dernière gorgée mais également se nourrir une dernière fois avant x heures de jeûne pour certains.
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Un jeûne total (sans eau ni nourriture), malgré le travail et la chaleur.
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Une rupture de jeûne, souvent tard (encore en fonction du mois) et souvent nutritionnellement déséquilibrée.
Répétez cela pendant 30 jours et vous comprendrez pourquoi bon nombre de pratiquants se sentent physiquement fatigués et faibles.
Bien que ce jeûne ait des similarités avec, ce que l’on appelle dans le milieu de la nutrition, le jeûne intermittent, c’est, selon moi, le changement de rythme radical auquel le corps est soumis qui occasionne cette faiblesse. Nous sommes en pleine loi de l’Hormèse, chère à mon ami Pierre Dufraisse, naturopathe célèbre pour sa chaine Youtube Vérisme TV. Effectivement, le fait d’imposer à son organisme un changement radical, sans temps d’adaptation, peut provoquer chez certains un stress au-delà de leur capacité de gestion. C’est également pourquoi il est plus facile à gérer pour d’autres.
Une stratégie qui me parait pertinente, serait de préparer son organisme au préalable, afin de ne pas le stresser trop fortement le jour J. Il s’agira d’allonger progressivement le temps de jeûne nocturne et faire le plein de nutriments en prévision d’une période de restriction.
Vous êtes musulman et voulez savoir comment procéder ?
Trois semaines avant le jour J :
- Commencez par supprimer le petit déjeuner. Pour ceux qui n’en prennent pas, cela ne posera aucun problème.
- Prévoyez un ou plusieurs fruits du même type en cas de faim pendant la matinée.
- Ensuite laissez monter la faim en vous et attendez l’heure du déjeuner, repas lors duquel vous consommerez des crudités, une source de protéines (œuf/poisson/viande/légumineuses) et des légumes cuits. Pensez à ajouter de l’huile de colza à vos assiettes .
- Prévoyez une poignée d’oléagineux (amandes, noix de cajou, noisettes) en cas de faim pendant l’après-midi.
- Le dîner sera composé de légumes cuits (2/3) et d’une source de glucides (1/3) telle que le riz ou la patate douce.
Deux semaines avant le jour J :
- Pas de petit déjeuner
- Patientez jusqu’au déjeuner, en vous hydratant par petites gorgées tout au long de la matinée. Le déjeuner sera composé de crudités, de légumes cuits et d’une source de protéines.
- Prévoyez une poignée d’oléagineux (amandes, noix de cajou, noisettes) en cas de faim pendant l’après-midi.
- Le dîner sera composé de légumes cuits (2/3) et d’une source de glucides (1/3) telles que le riz ou la patate douce.
la semaine précédant le jour J :
- Pas de petit déjeuner
- Vous allez retarder au maximum l’heure du déjeuner. Les portions seront moins copieuses. Il sera composé d’une source de protéines et de légumes crus et cuits.
- Prévoyez une poignée d’oléagineux (amandes, noix de cajou, noisettes) en cas de faim pendant l’après-midi ou si la faim se fait sentir à quelques heures du dîner.
- L’heure du dîner sera calée sur l’heure approximative prévue pour la rupture du jeûne. Il sera composé d’une source de protéines, de légumes cuits (1/3) et d’une source de glucides (1/3) telle que le riz ou la patate douce.
- Vous prendrez soin de boire avant les repas et attendre au moins 1 heure avant de vous hydrater de nouveau, afin de ne pas perturber la digestion.
Bien, vous vous êtes préparés, physiquement et psychologiquement. Le Ramadan peut débuter.
Comment s’alimenter ? Quelle stratégie adopter pour que ce mois se déroule le mieux possible ?
Dois-je me lever plus tôt pour manger avant d’entamer le jeûne quotidien ?
Tout d’abord, il me semble que le repos est essentiel, donc dormez le plus longtemps possible ! Alors, remplacez le traditionnel thé à la menthe, chargé en sucre, par une infusion de tilleul. De plus, c’est pendant la phase de sommeil profond que vous produirez la ghréline, l’hormone responsable de la sensation de faim, et la leptine, responsable de la sensation de satiété. Si le sommeil n’est pas profond, la faim se fera sentir de manière plus prononcée le lendemain, avec une capacité moindre à se contrôler. Le sommeil est essentiel !
Concernant la rupture du jeûne, la fenêtre « temps » d’alimentation est restreinte, il faudra réhydrater progressivement l’organisme puis le nourrir, dans le sens « nutrition », pas nourrir pour « remplir ».
Tout d’abord, l’hydratation. Pensez aux jus de légumes, ils vous apporteront à la fois des nutriments et de l’eau. Buvez lentement par petites gorgées. Gardez à l’esprit que le thé a une action diurétique, à l’encontre de l’hydratation. Buvez toujours avant les repas et attendez au moins 1 heure pour vous hydrater après le repas.
Ensuite, l’alimentation. Elle devra être dense nutritionnellement, c’est-à-dire contenir un maximum de nutriments (vitamines, minéraux, acides gras…) sur le plus petit volume possible. Elle devra également être digeste, afin que le corps puisse, sans forcer, en retirer un maximum de bénéfices.
Vous débuterez par de l’avocat, des oléagineux ou des fruits secs, accompagnés de crudités comme les carottes râpées, le concombre, les radis, le tout arrosé d’huile (coco, colza, olive, noix).
Choisissez également une source de protéines concentrées comme la viande, les œufs et les poissons gras, riches en acides gras oméga 3 (qui sont essentiels), tels que le saumon, le maquereaux et les sardines. Pensez également aux légumineuses (pois chiches, lentilles, fèves…) qui sont de bonnes sources de minéraux.
En ce qui concerne la consommation de glucides, particulièrement la semoule, issue du blé, pour le traditionnel couscous, la farine et le sucre que l’on retrouve dans les pâtisseries (Mkhabez, baklawas…), il faudra limiter leur consommation, soyez modérés. Le pic de glycémie occasionné par leur consommation peut engendrer une hypoglycémie réactionnelle et provoquer des réveils nocturnes.
Pour les sportifs, c'est le moment de baisser le rythme! Entrainez-vous de préférence en fin de journée, à intensité basse à modérée et mettez la priorité sur la réhydratation et les jus de légumes.
Fin du Ramadan, que dois-je faire ?
RIEN ! Comment ça rien ?
Ce mois vous aura permis de vous recentrer, de prier, de méditer, d’être à l’écoute de ce qui se passe autour de vous, mais également en vous.
Alors profitez de la fin du Ramadan pour repartir sur des bases saines : Mangez lorsque vous avez faim, pas lorsque sonne la cloche de la cantine et consommez en fonction de votre tolérance digestive !
Ecoutez votre corps , il vous remerciera!
J'ai rédigé cet article en collaboration avec madame Seloua Limam, responsable de l'association JennA qui oeuvre à l'aide aux devoirs pour les enfants d'Annemasse, ainsi que pour la collecte de cartables et fournitures scolaires pour la Tunisie. Merci Seloua!